Comment décrire une image sur le web ?
Décrire des images peut prendre du temps et, selon la complexité de l’image, peut même s’avérer difficile. Que faire lorsque des images présentent des concepts complexes, abstraits ou techniques ? Regardons cela de plus près.
Deux bonnes pratiques à garder en tête
Aller à l’essentiel
Vous n’êtes pas obligé de décrire la couleur de chaque feuille de cet arbre dans un champ, ou bien le nombre de dalles qui composent la terrasse de cette maison-témoin ! L’art du texte de remplacement est de savoir quel est ou quels sont les éléments vraiment essentiels à la compréhension de l’image publiée dans son contexte. Prenons un exemple avec le contenu dispensé ci-dessous : une annonce pour l’adoption d’un chat nommé Myrtille.
Myrtille a l’air choupette, mais on va ici se concentrer sur l’essentiel : dire à l’internaute à quoi Myrtille ressemble pour qu’il puisse en se faire une idée. Cela passe par la couleur de sa robe (trois couleurs) ou la couleur de ses yeux (dorés)… mais on n’est pas obligé de s’arrêter au nombre de ses moustaches 😸
Un point c’est tout
Ponctuer un texte de remplacement comme du texte courant permet de restituer une certaine dynamique dans la lecture par une synthèse vocale. Conclusion ? Terminez le texte alternatif par un point : le texte restitué par un lecteur d’écran en sera d’autant plus fluide et agréable pour l'utilisatrice. PS : ça marche aussi pour les autres signes de ponctuation !
Deux usages à bannir
Bis repetita
Les lecteurs d’écran lisent un ensemble d’informations numériques dont la sémantique raconte le type de contenu rencontré : image, texte, titre, lien, etc.. Aussi, quand un lecteur arrive sur une image, il va naturellement informé à l’internaute qu’une image est en passe d’être lue. C’est pourquoi il faut éviter de commencer vos textes alternatifs par "Image de".
Il peut toutefois être utile pour votre lecteur de connaître le graphisme attribué à l’image : est-ce une illustration ? Un graphique ? Une photographie ? Une peinture générée par une IA ? Le lecteur peut alors plonger dans un imaginaire visuel particulier, et modeler une vision de ce qui lui est décrit.
#TooMuch
Très sympa cette vingtaine de hashtags et la petite blagounette calée dans votre alternative textuelle ; mais ces informations ne sont pas essentielles à la description de votre image et ne doivent donc pas apparaître. Ça vaut aussi pour les messages marketing et autres codes secrets planqués 😉
Quelques exemples
Un texte alternatif qui invite au voyage
Vous êtes chargée de communication dans une structure proposant des activités touristiques sur la faune des montagnes françaises. Vous publiez régulièrement des images pour promouvoir la beauté de cet environnement sur Instagram. Le dernier cliché en date est celui-ci :
Le texte alternatif à renseigner peut être, par exemple, “Un oiseau noir s'élance en direction d'un refuge de montagne, des sommets enneigés en toile de fond.” Il sera certainement plus précis, imagé voir poétique que “Oiseau noir volant vers une maison.”
Un texte alternatif qui informe d'un événement
Vous êtes chargé de communication chez France Travail. Vous devez informer les bénéficiaires de la tenue d'un événement professionnel autour de l'automobile.
Qu'est-ce qui est essentiel sur cette image ? Le fait que la personne porte un sweat gris ou les dates de l'événement en question ? Le texte d'introduction indique déjà un contexte : l'événement est consacré à la mobilité. On peut donc penser que le texte alternatif devra surtout renseigner des éléments ayant trait aux informations pratiques ; par exemple : "L'affiche de la semaine des services de l'automobile et de la mobilité vous donne rendez-vous du 27 janvier au 3 février 2023 pour sa neuvième édition." — sauf si ces éléments sont précisés plus loin, dans l'article.
Une description détaillée qui invite à la découverte
La NASA, plutôt active sur les réseaux sociaux, est pionnière dans l'utilisation de descriptions d'images. Sa méthode ? Compter sur une équipe pluridisciplinaire formée à l’accessibilité, et qui souhaite rendre la science accessible à tous.
En 2022, l’agence spatiale s’est faite remarquée sur X (ex-Twitter) pour l’objective mais néanmoins poétique description d’une image de supernova partagée par le télescope Hubble depuis l’espace. Voyez dans cet extrait comment l’équipe a réussi à décrire l’image tout en y ajoutant une touche sensible et aérienne : "L'image est divisée horizontalement par une ligne ondulante entre un paysage de nuages (...) et une partie supérieure relativement claire. (...) Dans la partie supérieure droite de l'image, la nébuleuse est traversée par des traînées translucides et vaporeuses qui ressemblent à des nuages".
Que personne ne s’affole : vous n’êtes pas obligé de réunir toute votre équipe pour rédiger des descriptions poétiques ! Je voulais surtout vous montrer, au travers de cet exemple, une approche particulière de la description d’image. Et combien elles peuvent être appréciées par une personne aveugle tout comme par un individu intéressé par le sujet traité.
Conclusion
Quand on parle d’accessibilité, l’objection qui revient le plus souvent demeure : “Il n’y a pas de personnes en situation de handicap dans mon audience.” Il y en a, c’est juste que vous ne le “voyez” pas 😉
Vous l’aurez compris (du moins, je l’espère) : prendre soin de décrire une image sur le web, c’est prendre soin de celleux qui n’y ont pas accès ; et pas seulement des personnes atteintes de cécité, mais bien de vous aussi, binoclards du futur. Comme le résume Chancey Fleet, tweeteuse aveugle : “[Décrire une image est] un excellent moyen d'explorer ce que vous comprenez, remarquez et déduisez d'une image. Il s'agit d'une pratique de réflexion simple qui fera de vous un concepteur, un analyste et un communicateur plus attentif.” Bref : mieux vaut caler quelques mots que rien du tout. Et en plus, c’est bon pour le SEO !
Et puis, vous n’avez pas d’excuse : de manière générale, les réseaux sociaux tout comme les CMS (type Wordpress) vous permettent de rédiger un texte alternatif lorsque vous publiez une image. Certains vont même jusqu’à vous rappeler de le faire, voire de les générer automatiquement.
Attendez voir… Générer automatiquement des textes alternatifs, voir des descriptions d’images ? Ma parole, ne serait-ce pas là un rempart à la flemmagite aiguë qui sévit sur le web quand il s’agit de décrire des visuels ? Ce sera le sujet d’un prochain article.
Sources
Attention : beaucoup de ces ressources sont en anglais.
- Un guide de la description d’images proposé par le musée new-yorkais Cooper-Hewitt de New York
- Un guide complet sur la description d’images fourni par l’Accessible Publishing du Canada.
- Un billet en anglais proposé par Axess Lab, contenant tout ce qu'il faut savoir sur les textes alternatifs.
- Le Diagram Center propose un contenu très détaillé sur la description d’image, qu’elle soit simple ou complexe.
- Le média Mashable se pose la question : Comment rédiger un texte alt et des légendes d'images accessibles pour vos articles en ligne ?
- Une des notices d’Accede Web est consacrée à l’utilisation des images de manière accessible.
- Des bonnes pratiques de rédaction d’alternatives listées par l’entreprise Empreinte Digitale.
- Un article impactant du New York Times à propos de l’attribut alt.
- Des conseils sur la manière de décrire une image sont ici fournis en anglais par la plateforme Accessible Social.
- Le Washington Post relate le succès rencontré par les alternatives textuelles des tweets de la NASA.
- Le travail mené par les équipes pluridisciplinaires pour la description d’une supernova
- La campagne de sensibilisation à l’attribut alt lancée sur Twitter/X a été malencontreusement détournée
Pour aller plus loin
- Le Diagram Center a mis au point un outil pour s’entraîner à décrire des images.
- Cet article se demande s’il faut nécessairement préciser la couleur de peau des personnes présentes sur une image.
- Cette plateforme propose de transformer l’exercice de l’alt-text en un moment de rédaction créative.
- Haben Girma sensibilise au handicap et à l’accessibilité via des tweets
- Alex Haagaard démontre combien la génération automatique de textes alternatifs par les réseaux sociaux est limitée.
Merci à Zoubeir Haffez pour sa relecture précise et précieuse ♥️ Je vous invite à découvrir son podcast ou d'aller faire un tour sur son profil Linkedin !
Notez que cet article a été rédigé par mes soins en tant qu’internaute voyante non-aguerrie à l’utilisation d’un lecteur d’écran. Il a donc été relu par des personnes non-voyantes ou malvoyantes utilisatrices de cet outil d’assistance pour plus de pertinence. Si vous souhaitez compléter ou corriger un propos, je vous invite à me contacter à l’adresse bonjour@senuba.com